Il y a maintenant plus d’un an qu’une nouvelle gouvernance est en place, tant au niveau local qu’au plan national. Les campagnes menant à ces élections ont produit d’immenses espoirs. La majorité des électeurs faisant ce qui leur semblait être le meilleur des choix. Les déçus de ces choix sont nombreux, et si c’était à refaire, le meilleur des choix ne serait aujourd’hui, au mieux, que le moins mauvais des choix.
Par souci de respect de ces choix, et parce que je sais que la gestion de ce territoire n’est pas simple, je m’étais imposé de ne pas interférer dans la conduite des affaires publiques locales pendant 6 mois. Puis il y eu Irma. J’ai choisi de donner 10 mois de plus… Mais aujourd’hui je suis inquiet. En effet, à 44 jours de la date anniversaire d’Irma sur Saint-Martin, le sentiment qui prévaut dans l’opinion publique est que rien n’avance (ou si peu et si lentement), et chacun sait que si on n’avance pas, on recule.
Je suis inquiet parce que :
1 – Les très fréquents déplacements du Président, signe de la pugnacité que je lui reconnaît, n’ont pas produit, de son propre aveu, les retours financiers escomptés. Peut-être aurions nous pu faire la, quelques petites économies. Ou alors peut-être qu’il eut été plus efficace de moins voyager mais d’être accompagné d’une petite délégation plus largement représentative du territoire. Je suis surpris, par ailleurs, que nous ayons accepté la Présidence des RUP françaises dans un contexte ou notre collectivité a plus que jamais besoin de toute notre attention. Exces of multitasking may look like agitation, sometimes. 2- J’ai l’impression que l’Etat, qui n’a pas d’état d’âme, se dit qu’il a déjà mis beaucoup d’argent dans les « outre-mer » et ne souhaite pas en mettre davantage. Au contraire il semble chercher des niches de rentrées (cf l’affaire de la suppression des 30% d’abattement… qui par ailleurs ne nous concerne pas). Face à ce constat, n’eut il pas mieux valu ne pas compter sur une hypothétique générosité de l’Etat, et profiter de l’occasion d’une grande médiatisation, pour insister davantage sur ce qui est dû par l’état depuis 2007? Nous savons que la CTC a bien pointé les faiblesses des services de l’Etat au cours des années récentes. (reversements IRPP, françaises des jeux, compensation octroi de mer, code natinf…). Nous savons que la confiance en la parole de l’Etat doit être tempérée par les stratégies dilatoires utilisées par le passé pour retarder des versements reconnus comme dus. Nous ne sommes que David face à l’Etat et David n’avait pas de muscle à montrer.
3- Nous sommes en pleine saison cyclonique et même si quelques efforts sont visibles, de trop nombreux habitants sont mal clos et mal couverts. Ils vivent dans une angoisse permanente et n’ont d’autre choix que d’espérer que le climat sera bienveillant assez longtemps pour leur permettre de solutionner leur problème. La moindre onde tropicale forte pourrait avoir de grandes conséquences sur la vie des gens et sur l’économie balbutiante du territoire. Quelles aides pour quels bénéficiaires et dans quels délais ? Je n’oublie pas la responsabilité de certaines compagnies d’assurances qui ont manqué e réactivité. Ou alors dire au gens de se débrouiller autrement.
4- Je crains que nous ne serons pas prêt pour la rentrée scolaire. Après Irma les effectifs à scolariser étaient significativement plus bas, à tous les niveaux du système. Il me semble que pour la rentrée prochaine les effectifs tendent à remonter. Or il manque le collège Soualiga (700 élèves) l’école élémentaire Nina Duverly (4OO élèves) et l’école maternelle de Cul de sac. Les 4 salles prévues avant Irma à la cité scolaire n’ont pas été livrés… et il en faudrait davantage. Avons nous vraiment la capacité d’accueil pour scolariser tous les élèves dans des conditions « normales » ? 5- Je ne vois aucune campagne de sensibilisation aux risques naturels (cycloniques en particulier). Il est pourtant important de répéter les messages de précautions. Cette communication préventive est d’autant plus importante que nous sommes un territoire ou les gens vont et viennent et ou le multilinguisme est une réalité incontournable. Chacun, y compris les enfants en âge de comprendre, doit connaître l’endroit, chez lui ou ailleurs, ou il sera en sécurité pendant un cyclone. Chacun devrait savoir quoi faire en cas de tremblement de terre, chacun doit savoir ou se rendre en cas de tsunami (God forbid). La sensibilisation du grand public à la culture du risque est de la responsabilité des pouvoirs publics, et ceci doit se faire ici, de manière conjointe avec la partie sud de l’île, naturellement. (Cela va sans dire mais il vaut mieux le dire). Au moins un millier de personnes arriveront de vacances ou pour la 1ere fois sur l’île, dans un mois. La communication en matière de risque est-elle bordée, ne serait-ce que pour les rassurer ?
En conséquence, compte tenu de la difficulté à obtenir de la part de l’Etat, des financements directs suffisants sous forme de subventions, pour faire face à une situation économique et sociale dégradée dans un territoire exposé aux risques naturels, n’est il pas temps d’optimiser les ressources issues du territoire? Pour commencer, il faudrait à mon sens :
Mieux utiliser les ressources humaines issues du territoire en encourageant davantage nos jeunes intellectuels à occuper des postes dans la fonction publique (métiers de l’éducation, métiers de la santé, métiers de la sécurité …) ou dans le privé. Cela coûtera, à terme, moins cher à l’Etat, contribuera mieux à l’économie locale et permettra une meilleure réactivité en cas de crise. Les métiers manuels ne doivent pas être négligés. Par exemple, il faut neuf mois (de novembre an1 à juillet an2 pour la formation de base d’un bon ouvrier polyvalent du bâtiment (manoeuvre) qui peut ensuite devenir ouvrier ou agent de maintenance dans les hôtels. La solution n’est sûrement pas simple mais le constat est là : il y a, en même temps, beaucoup de travail et beaucoup de chômage. Tous les efforts doivent être fait pour réduire ce hiatus.
Conforter d’une manière ou d’une autre celles des entreprises qui ont gardé leur confiance au territoire malgré les contraintes conjoncturelles. Il faut créer le cercle vertueux :« développement économique => progrès social => sérénité sociale », qui favorise la confiance en l’avenir et l’investissement.
Rechercher de manière systématique les opportunités de mutualisation, de complémentarité, de coopération avec nos voisins immédiats (pourquoi pas depuis Ste Lucie jusqu’à Ste Croix).
Mieux valoriser les éléments naturels dont nous disposons : nos terres agricoles réputées propres et libres de tous pesticides et la mer qui est partout. Il n’est pas utopique de penser que nous pouvons mieux couvrir nos besoins en produits agricoles, végétaux et animaux, de qualités indiscutables.
Mieux exploiter notre capacité à vendre des services utiles à l’international parce que nous sommes multilingues et parce que notre connexion électronique au monde est encore sous utilisée.
Je n’ai pas à inventer l’eau bouillante, j’observe simplement autour de moi. Soyons donc un peu plus créatif à partir de nos réalités. Je ne demande qu’à être rassuré.